[n° ou bulletin] est un bulletin de
Titre : |
38 - Novembre 2013 - Autonomie contre autonomie. Féminisme. L'emprise technologique |
Type de document : |
texte imprimé |
Année de publication : |
2013 |
Langues : |
Français (fre) |
Résumé : |
Mini-dossier « Pourquoi les technologies nous posent-elles toujours problème ? »
Le déferlement technologique modèle notre société et nous ne pouvons plus l’analyser sans en tenir compte. Pilier de l’économie moderne, la technologie est un moteur du capitalisme. La production subit de plein fouet la rationalisation techno-libérale, qui tend à accélérer ses cycles. Dans une perpétuelle course à la nouveauté, on produit toujours plus vite des marchandises industrielles fonctionnant avec toujours plus d’électronique. L’automatisation et l’informatisation des processus de production scellent la prise de pouvoir des ingénieurs et de leurs machines. Beaucoup de métiers sont déqualifiés et se font de plus en plus derrière un écran, quand ils ne disparaissent pas simplement. Les savoir-faire des artisans deviennent inutiles, et les tâches confiées aux ouvrier-e-s sont toujours plus simples et morcelées. À l’extrême, la production industrielle semble pouvoir se satisfaire de n’employer que des informaticiens et des manutentionnaires.
Cette informatisation continue des différents métiers, ainsi que la nécessité d’écouler la kyrielle de nouveaux objets électroniques et technologiques produits, a encouragé leur diffusion massive. Après avoir envahi les lieux de travail, la possession d’un ordinateur connecté à internet et d’un téléphone portable est devenue une norme. Ce qui ne va pas sans bouleverser nos comportements et nos relations sociales. Fonctionnant sur l’idée de dématérialisation, avec l’instantanéité comme dogme, ces technologies engendrent un zapping permanent qui tend à délégitimer toute idée d’engagement sur la durée. Ce qui se répercute jusque dans nos pratiques militantes : si les informations, voire les idées, se diffusent plus rapidement, on consacre moins de temps à s’organiser et s’engager socialement, pour analyser, partager ces idées, et les transformer en actes. On peut se demander si les natives et natifs du numérique en seront toujours capables.
Depuis dix ans que nous analysons et critiquons l’asservissement par les technologies – nucléaires, numériques ou encore celles issues du génie génétique –, le phénomène s’est accéléré et l’on peut aujourd’hui parler d’emprise numérique.Ce phénomène est induit par le déploiement de l’Internet à haut débit, l’apparition du Wi-Fi et la multiplication et la diffusion massive des moyens de se connecter au réseau Internet (Smartphone, tablette, etc.). Conjointement au développement de capacités de stockage faramineuses, ces possibilités d’accès permanent et en tout lieu alimentent le rêve des États et des entreprises d’un contrôle total par la surveillance et la mise en chiffres intégrale de la réalité, y compris de nos comportements. Mais la possibilité de se connecter en permanence, notamment à travers l’usage généralisé d’appareil mobiles, pose un problème en soi. Les fanatiques de l’innovation évoquent l’“ idéal ” du cyborg ou l’humanité augmentée et, au-delà, l’idéologie transhumaniste. Force est de constater qu’une partie de l’humanité est déjà connectée en permanence et délègue nombre de ses capacités à des prothèses électroniques. Pour notre part, nous refusons d’être transformé-e-s en robots, en “machines humaines ”. La technologie n’est pas neutre, elle porte une logique sociale, celle du soi-disant “progrès ” technique, qui détruit nos manières de vivre, de penser et de sentir en tant qu’êtres humains.
– L’emprise technologique
– S’adapter ou lutter
– Anti-industriels, rapport d’étape
Mini-dossier « Féminisme »
Le féminisme a joué un rôle prépondérant dans la construction d’Offensive et dans nos luttes. Nous nous sommes notamment appuyé-e-s sur la notion de genre, peu répandue il y a dix ans. Persuadé-e-s qu’il nous fallait nous débarrasser des oripeaux de la féminité et de la masculinité pour pouvoir construire un futur égalitaire et émancipateur, nous n’avons eu de cesse de mettre la notion de genre, les outils de la déconstruction et ceux de la non-mixité en avant, dans le journal ou dans les collectifs dans lesquels nous nous sommes impliqué-e-s. Depuis, la notion de genre a évolué hors du monde militant et féministe. Les institutions l’ont légitimée et en ont édulcoré la teneur, monopolisant le concept et balayant toute revendication d’ordre révolutionnaire.
Le premier numéro d’Offensive paraissait dans un contexte d’institutionnalisation des revendications féministes, avec l’émergence de Ni putes ni soumises, faire-valoir du Parti socialiste. Les temps changent quelque peu mais les méthodes perdurent puisque Ni putes ni soumises, désormais coquille vide, a été remplacée par Osez le féminisme… Les luttes n’ont pas cessé même si elles ne sont pas toujours très visibles : pour défendre le droit à l’avortement, contre les images sexistes, contre l’homophobie, la lesbophobie, la biphobie et la transphobie, etc. Des modes d’action radicaux comme les marches de nuit non mixtes sont revenus au goût du jour. Les lignes de clivage féministes se sont durcies ces dix dernières années, comme on a pu le voir avec les débats sur le « voile » et la prostitution. Dans le contexte actuel de criminalisation des populations, il nous semble important de penser l’articulation du racisme et du système de domination masculine, bien que nous n’ayons pas consacré beaucoup de pages à cette question. Ce pourrait être l’un de nos futurs chantiers…
– En avoir ou pas
– Genre, l’expression du patriarcat
– À la croisée des systèmes de domination
Mini-dossier « Autonomie contre autonomie »
Au début de l’année 2013, offensive a publié avec la complicité des éditions L’Échappée un recueil de textes sur le thème de l’autonomie. Construire l’autonomie est la réédition de dossiers et de textes parus au cours de dix ans de travail éditorial. Loin de se canton ner à la seule autonomie matérielle, ces écrits venaient interroger de multiples espaces où le capitalisme s’est fait également le chantre de cette idée. Si l’autonomie pouvait donc être louée, elle était aussi l’objet de critiques.
Ainsi, dans une préface inédite, nous signalions notre refus de soutenir toutes les formes d’autonomie. Tout en prônant une «autonomie ouverte sur une transformation sociale», il nous paraissait impossible de passer sous silence le fait que l’autonomie est aussi devenue un mot/maux du libéralisme: «Du management néolibéral au “développement personnel”, on enjoint [les individu-e- s] à se réaliser eux et elles-mêmes, à inventer leur vie, à faire preuve d’initiative pour “devenir ce qu’ils sont”. Avec à la clé une fragilisa tion psychique des personnes, rendues seules responsables de leurs échecs éventuels. Car dans les faits, autonomie signifie le plus souvent adaptation. Et on ne peut guère s’adapter à un monde de plus en plus déshumanisé».
Et cette autonomie soutenue par les apologistes libéraux et autres vendeurs de bonheur sous emballage n’est pas tombée du Saint-Esprit. L’autonomie libérale, outre son propre corpus, a puisé dans les mouvements de contes tation: «De l’“entrepreneuriat punk” à la firme high tech, l’autonomie et le “do it yourself”, promus dans les années 1970-1980 comme des valeurs politiques subversives, sont devenus aujourd’hui les slogans d’un capitalisme de coproduction, voire d’autoproduction». À cet endroit-là aussi, il y avait de quoi s’interroger. De quelle autonomie parlons-nous ? Comment l’autonomie peut se perdre dans les dédales de la pensée libérale? Quand vient-elle au contraire se lover dans un désir profon dément contestataire pour penser d’autres relations sociales ?
Ce dossier «Autonomie contre autonomie», c’est l’histoire d’une opposition, qui se tord et se retord sous des sens et des formes contradictoires depuis des décennies. À travers quatre textes, ce dossier offre un prolongement à cette réflexion entamée depuis 2003 dans offensive. Chacun des articles montre à quel point l’autonomie peut prendre de multiples sens et que, justement, le sens que nous y mettons est un enjeu de la pensée révolutionnaire.
– À la recherche de l’autonomie
– L’autonomie comme table rase
– L’éducation de l’enfant dans les milieux ouvriers
– Do-It-Yourself, de Castoriadis à Castorama |
Permalink : |
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[n° ou bulletin] est un bulletin de
38 - Novembre 2013 - Autonomie contre autonomie. Féminisme. L'emprise technologique [texte imprimé] . - 2013. Langues : Français ( fre)
Résumé : |
Mini-dossier « Pourquoi les technologies nous posent-elles toujours problème ? »
Le déferlement technologique modèle notre société et nous ne pouvons plus l’analyser sans en tenir compte. Pilier de l’économie moderne, la technologie est un moteur du capitalisme. La production subit de plein fouet la rationalisation techno-libérale, qui tend à accélérer ses cycles. Dans une perpétuelle course à la nouveauté, on produit toujours plus vite des marchandises industrielles fonctionnant avec toujours plus d’électronique. L’automatisation et l’informatisation des processus de production scellent la prise de pouvoir des ingénieurs et de leurs machines. Beaucoup de métiers sont déqualifiés et se font de plus en plus derrière un écran, quand ils ne disparaissent pas simplement. Les savoir-faire des artisans deviennent inutiles, et les tâches confiées aux ouvrier-e-s sont toujours plus simples et morcelées. À l’extrême, la production industrielle semble pouvoir se satisfaire de n’employer que des informaticiens et des manutentionnaires.
Cette informatisation continue des différents métiers, ainsi que la nécessité d’écouler la kyrielle de nouveaux objets électroniques et technologiques produits, a encouragé leur diffusion massive. Après avoir envahi les lieux de travail, la possession d’un ordinateur connecté à internet et d’un téléphone portable est devenue une norme. Ce qui ne va pas sans bouleverser nos comportements et nos relations sociales. Fonctionnant sur l’idée de dématérialisation, avec l’instantanéité comme dogme, ces technologies engendrent un zapping permanent qui tend à délégitimer toute idée d’engagement sur la durée. Ce qui se répercute jusque dans nos pratiques militantes : si les informations, voire les idées, se diffusent plus rapidement, on consacre moins de temps à s’organiser et s’engager socialement, pour analyser, partager ces idées, et les transformer en actes. On peut se demander si les natives et natifs du numérique en seront toujours capables.
Depuis dix ans que nous analysons et critiquons l’asservissement par les technologies – nucléaires, numériques ou encore celles issues du génie génétique –, le phénomène s’est accéléré et l’on peut aujourd’hui parler d’emprise numérique.Ce phénomène est induit par le déploiement de l’Internet à haut débit, l’apparition du Wi-Fi et la multiplication et la diffusion massive des moyens de se connecter au réseau Internet (Smartphone, tablette, etc.). Conjointement au développement de capacités de stockage faramineuses, ces possibilités d’accès permanent et en tout lieu alimentent le rêve des États et des entreprises d’un contrôle total par la surveillance et la mise en chiffres intégrale de la réalité, y compris de nos comportements. Mais la possibilité de se connecter en permanence, notamment à travers l’usage généralisé d’appareil mobiles, pose un problème en soi. Les fanatiques de l’innovation évoquent l’“ idéal ” du cyborg ou l’humanité augmentée et, au-delà, l’idéologie transhumaniste. Force est de constater qu’une partie de l’humanité est déjà connectée en permanence et délègue nombre de ses capacités à des prothèses électroniques. Pour notre part, nous refusons d’être transformé-e-s en robots, en “machines humaines ”. La technologie n’est pas neutre, elle porte une logique sociale, celle du soi-disant “progrès ” technique, qui détruit nos manières de vivre, de penser et de sentir en tant qu’êtres humains.
– L’emprise technologique
– S’adapter ou lutter
– Anti-industriels, rapport d’étape
Mini-dossier « Féminisme »
Le féminisme a joué un rôle prépondérant dans la construction d’Offensive et dans nos luttes. Nous nous sommes notamment appuyé-e-s sur la notion de genre, peu répandue il y a dix ans. Persuadé-e-s qu’il nous fallait nous débarrasser des oripeaux de la féminité et de la masculinité pour pouvoir construire un futur égalitaire et émancipateur, nous n’avons eu de cesse de mettre la notion de genre, les outils de la déconstruction et ceux de la non-mixité en avant, dans le journal ou dans les collectifs dans lesquels nous nous sommes impliqué-e-s. Depuis, la notion de genre a évolué hors du monde militant et féministe. Les institutions l’ont légitimée et en ont édulcoré la teneur, monopolisant le concept et balayant toute revendication d’ordre révolutionnaire.
Le premier numéro d’Offensive paraissait dans un contexte d’institutionnalisation des revendications féministes, avec l’émergence de Ni putes ni soumises, faire-valoir du Parti socialiste. Les temps changent quelque peu mais les méthodes perdurent puisque Ni putes ni soumises, désormais coquille vide, a été remplacée par Osez le féminisme… Les luttes n’ont pas cessé même si elles ne sont pas toujours très visibles : pour défendre le droit à l’avortement, contre les images sexistes, contre l’homophobie, la lesbophobie, la biphobie et la transphobie, etc. Des modes d’action radicaux comme les marches de nuit non mixtes sont revenus au goût du jour. Les lignes de clivage féministes se sont durcies ces dix dernières années, comme on a pu le voir avec les débats sur le « voile » et la prostitution. Dans le contexte actuel de criminalisation des populations, il nous semble important de penser l’articulation du racisme et du système de domination masculine, bien que nous n’ayons pas consacré beaucoup de pages à cette question. Ce pourrait être l’un de nos futurs chantiers…
– En avoir ou pas
– Genre, l’expression du patriarcat
– À la croisée des systèmes de domination
Mini-dossier « Autonomie contre autonomie »
Au début de l’année 2013, offensive a publié avec la complicité des éditions L’Échappée un recueil de textes sur le thème de l’autonomie. Construire l’autonomie est la réédition de dossiers et de textes parus au cours de dix ans de travail éditorial. Loin de se canton ner à la seule autonomie matérielle, ces écrits venaient interroger de multiples espaces où le capitalisme s’est fait également le chantre de cette idée. Si l’autonomie pouvait donc être louée, elle était aussi l’objet de critiques.
Ainsi, dans une préface inédite, nous signalions notre refus de soutenir toutes les formes d’autonomie. Tout en prônant une «autonomie ouverte sur une transformation sociale», il nous paraissait impossible de passer sous silence le fait que l’autonomie est aussi devenue un mot/maux du libéralisme: «Du management néolibéral au “développement personnel”, on enjoint [les individu-e- s] à se réaliser eux et elles-mêmes, à inventer leur vie, à faire preuve d’initiative pour “devenir ce qu’ils sont”. Avec à la clé une fragilisa tion psychique des personnes, rendues seules responsables de leurs échecs éventuels. Car dans les faits, autonomie signifie le plus souvent adaptation. Et on ne peut guère s’adapter à un monde de plus en plus déshumanisé».
Et cette autonomie soutenue par les apologistes libéraux et autres vendeurs de bonheur sous emballage n’est pas tombée du Saint-Esprit. L’autonomie libérale, outre son propre corpus, a puisé dans les mouvements de contes tation: «De l’“entrepreneuriat punk” à la firme high tech, l’autonomie et le “do it yourself”, promus dans les années 1970-1980 comme des valeurs politiques subversives, sont devenus aujourd’hui les slogans d’un capitalisme de coproduction, voire d’autoproduction». À cet endroit-là aussi, il y avait de quoi s’interroger. De quelle autonomie parlons-nous ? Comment l’autonomie peut se perdre dans les dédales de la pensée libérale? Quand vient-elle au contraire se lover dans un désir profon dément contestataire pour penser d’autres relations sociales ?
Ce dossier «Autonomie contre autonomie», c’est l’histoire d’une opposition, qui se tord et se retord sous des sens et des formes contradictoires depuis des décennies. À travers quatre textes, ce dossier offre un prolongement à cette réflexion entamée depuis 2003 dans offensive. Chacun des articles montre à quel point l’autonomie peut prendre de multiples sens et que, justement, le sens que nous y mettons est un enjeu de la pensée révolutionnaire.
– À la recherche de l’autonomie
– L’autonomie comme table rase
– L’éducation de l’enfant dans les milieux ouvriers
– Do-It-Yourself, de Castoriadis à Castorama |
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